Population
de langue indo-européenne qui constitua un puissant État en Anatolie
centrale au IIè millénaire. Le nom des Hittites est emprunté à
celui de leurs prédécesseurs dans la région, les Hatti.
HISTORIQUE :
C'est sans doute
aux alentours de -2300 que les premières bandes d'émigrants parlant
des dialectes indo-européens arrivent en Asie Mineure. La question reste
discutée de savoir si, venant des régions pontiques (nord de la
mer Noire), elles ont pénétré en Asie antérieure
en passant par les détroits à l'ouest (Bosphore et Hellespont)
ou les cols du Caucase à l'est. Il est bien possible que ces bandes se
soient infiltrées par les deux côtés. La présence
des Hittites, un groupe descendant de ces envahisseurs du Bronze Ancien, est
attestée en Cappadoce à l'époque des colonies assyriennes,
au tout début du IIè milIénaire. On ne sait dans quelle
mesure on peut relier les premiers rois Hittites connus à deux personnages
mentionnés dans des tablettes de Kanesh, rois d'une cité appelée
Kussar. Pithana et son fils Anitta, qui semblent bien avoir été
des Hittites. Le premier nom de roi que nous connaissions par un texte tardif,
le Rescrit de Télépinu (vers -1525 -1500), est Labarna. Son épouse
royale se serait appelée Tawananna, nom qui, comme Labarna (transformé
en Tabarna), devint le titre des reines. Le premier roi mieux connu historiquement
est Hattusili 1er "fils (ou neveu ?) de Labarna". C'est avec lui
que commence réellement ce qu'on a appelé l'ancien royaume hittite,
bien qu'on le fasse de préférence débuter avec Labarna,
vers -1630. La politique d'expansion d'Hattusili 1er , "qui installe la
capitale du royaume à Hattusa", fut poursuivie par son successeur
(sans doute son petit-fils) Mursili Ier (v. -1620 -1590). Il parvint à
prendre Alep puis, vers 1595, il osa un raid audacieux qui le conduisit jusqu'à
Babylone, qu'il pilla, mettant fin à la dynastie amorrite et ouvrant
la porte aux Kassites. De cette aventure, le royaume hittite ne retira pas grand-chose,
sinon un certain butin. Le roi fut assassiné par son beau-frère
qui prit le pouvoir sous le nom d'Hantili Ier (vers -1590 -1560). Le nouveau
roi maintint l'intégrité de l'empire par une série de campagnes
vers l'ouest, contre une puissance montante, les Hurrites, et vers le nord contre
un nouvel adversaire qui apparaît sous son règne, les Gasgas (ou
Kaskas). Ces guerriers habitaient les montagnes au nord de la Cappadoce,
dans ce qui deviendra le "Pont" à l'époque gréco-romaine.
Ils ne cesseront plus de harceler les Hittites pendant le reste de leur histoire
et ils participeront certainement à la chute de l'empire.
Hantili ayant été
assassiné à son tour, commence une période d'anarchie où
les Grandes familles hittites se disputent le trône. Un certain ordre
fut rétabli par Télépinu (ou Telebinu), qui prit le pouvoir
vers -1525 après avoir déjoué un complot et exilé
les fauteurs de troubles. Il érigea le conseil du Panku (assemblée
de citoyens en âge de porter les armes (?)) en haute cour de justice.
Il institua une loi de succession au trône que le Faucu devait faire respecter,
avec le droit de mettre en accusation un souverain coupable de crimes et de
le faire mettre à mort. Bien que le Faucu ait par la suite perdu de son
autorité, la loi de succession directe fut toujours observée (sauf
par Hattusili III lorsqu'il dut se résoudre à se révolter
contre l'arbitraire de son neveu). Si un certain ordre est revenu grâce
aux initiatives de Télépinu, le royaume hittite reste en retrait
pendant les règnes suivants. Certains auteurs font débuter ce
qu'on appelle le "nouvel" empire hittite avec Tudhaliyas 1er (anciennement
Il, -1460 -1440), qui régna avec son épouse Nikalmati. En réalité,
le royaume ne fait que se défendre, même s'il semble qu'Hattusili
Il ait réussi à maintenir un équilibre avec Alep. Sous
Tudhaliyas Il (-1400 -1380), le royaume est même attaqué de tous
les côtés, et les Gasgas réussissent à mettre à
sac Hattusha. Le rétablissement se fait avec son frère (dans le
cas où il serait le fils d'Hattusili Il) ou son fils, Suppilullumas 1er (vers -1370 -1342), qui a su mêler habilement la diplomatie et la guerre.
Au cours de campagnes vigoureuses, il fit entrer le nord de la Syrie, avec en
particulier Ugarit, dans la sphère d'influence hittite, ce qui, en revanche,
ouvrit près d'un siècle de conflit avec l'Égypte. Il entra
en lutte avec le Mitanni, qui, sous les coups conjugués des Hittites
et de l'Assyrie, va bientôt disparaître. Il fit deux de ses fils
rois l'un de Karkemish, l'autre d'Alep. Sur le plan diplomatique, il maria ses
filles à des princes vassaux et lui-même épousa la fille
du roi de Babylone, avec qui il avait fait alliance. Du côté de
l'Égypte, après les intrigues qu'il avait menées auprès
des petits souverains syriens et canannéens vassaux de pharaon (en l'occurrence
Akhenaton), il eut le plaisir de recevoir une lettre d'une reine égyptienne
(sans doute la veuve de Toutankhamon) le priant de lui envoyer un fils comme
époux pour monter sur le trône de Thèbes. On sait que le
prince ne parvint pas dans la vallée du Nil, assassiné par on
ne sait qui, mais sans doute à l'instigation d'Ay ou d'Horemheb.
A sa mort, malgré
des échecs vers l'ouest et le nord, contre les Gasgas, Suppiluliuma laissa
un royaume puissant mais fragile à ses successeurs. On pense qu'il mourut
de la peste et que son successeur, Arnuwanda, fut bientôt terrassé
par la même maladie. Son plus jeune fils, Mursili II (-1340 -1310), maintint
l'héritage de son père au prix de guerres incessantes aussi bien
contre des coalitions vers la Syrie que contre des raids de barbares au nord.
C'est lui-même, dans ses Annales, qui nous dit qu'il dut lutter dix ans
durant pour rétablir et maintenir l'héritage de son père.
Nous connaissons quelques événements concernant le règne
de son fils et successeur Muwatalli Il (-1310 -1280) par l'Autobiographie du
frère de ce dernier, Hattusili III. On peut voir qu'il a confié
à celui-ci la tâche difficile de défendre les frontières
de l'empire contre les barbares Gasgas du Nord, et lui-même s' est réservé
les relations avec les grands royaumes du Sud et de l'Est. Il semble avoir réussi
à maintenir la prospérité du royaume tout en reprenant
les hostilités avec l'Égypte, hostilités qui se terminèrent
avec la bataille de Qadesh. Le fils
d'Hattusîli III, Tudhaliya IV (-1260 -1220), maintint encore l'empire
et parvint même à l'agrandir par la conquête de Chypre, le
plus grand fournisseur de cuivre de l'époque. La faiblesse réelle
de l'empire apparaît déjà sous ce règne : ainsi un
cousin du roi, Kurunta (autrement appelé Ulmi-Te-shub), devenu roi de
Tarhundassa, àl'ouest de la Cappadoce, obtint, par traité avec
Tudhaliya, de nombreuses concessions territoriales et se para des titres royaux
hittites Tabarna, "Mon Soleil, Grand Roi". Les deux derniers successeurs
de Thudaliya, Arnuwanda III (-1220 -1200) et Suppiluliuma II (-1200- vers -1180),
durent faire face à de nouvelles coalitions et à des invasions
qui eurent bientôt raison de l'Empire hittite, lequel disparut sous les
coups conjugués des Gasgas et des envahisseurs venus des rives de la
mer Égée, appelés "Peuples de la Mer" dans les
textes égyptiens.
Civilisation :
La richesse
des Hittites était naturellement en partie fondée sur l'agriculture
et l'élevage, mais aussi, dans ce pays de forêts, sur la coupe
du bois. Cependant, plus que les autres États du Proche-Orient Ancien, ils disposaient
de mines : peu de cuivre, mais de l'étain, de l'or, du plomb (l'un des
principaux produits du commerce des colonies assyriennes de Cappadoce) et surtout
du fer. Dès le XIVè s. pour le moins (le fer était connu
bien avant), les forgerons anatoliens ont acquis une suffisante maîtrise
dans son traitement pour que les rois hittites puissent l'utiliser au titre
de cadeaux. Le prétexte de l'hostilité du roi d'Assyrie Adad~nirârî
envers Hattusili III fut que celui-ci ne lui avait pas envoyé des épées
en fer qu'il lui avait demandées. Hattusili se défendit en déclarant
qu'il n'en disposait pas qui fussent d'assez bonne qualité pour satisfaire
sa demande. Le roi est un personnage
sacré dont les fonctions sont militaires et civiles mais aussi religieuses,
car il est le premier prêtre des dieux. C'est lui qui préside les
cérémonies religieuses avec la reine. L'importance de cette dernière
aussi bien dans le culte qu'à la cour est à noter. Elle a son
propre sceau, sa propre maison avec ses services, elle entretient des relations
personnelles avec les autres souverains. Puduhépa paraît avoir
été particulièrement active sur ce point, peut-être
parce que le hasard des fouilles a fourni une documentation relativement importante
la concernant. L'art des Hittites qui doit
beaucoup à leurs prédécesseurs Hattis, est connu par les
fouilles d'Hattusa, d'Alaca Höyük et du sanctuaire de Yazilikaya.
L'architecture des temples, dont il ne subsiste que les bases, révèle
des monuments complexes pourvus de nombreuses salles et galeries. Les enceintes
présentent des orthostates sculptés de reliefs comme à
Alaca Höyük, technique qui se perpétue dans l'art dit néohittite
du Ier mill. Le type du bît-idani (voir : architecture) semble être
d'origine hittite. La religion est fortement
marquée par les conceptions et les divinités suméro-akkadiennes
et aussi par les divinités hurrites. Nombre de dieux hatti ont été
intégrés dans le panthéon dominé par le dieu du
Temps et de l'Orage, à qui la terre est censée appartenir : le
roi est son régent. Le Soleil est la première divinité,
mais avec des aspects très singuliers puisque la première divinité
solaire est la déesse-soleil Hatti Arinna, plus importante que le dieu-soleil
Istanu. Un autre dieu non négligeable est Télépinu. Parmi
les divinités d'origine étrangère, celle qui occupe la
plus grande place est sans doute Ishtar.
LANGUE ET LITTÉRATURE :
Les deux principales langues de l'empire, le hittite et le luwite sont deux
dialectes indo-européens. Le nom réel du hittite est "nésite"
ou "nesili", la langue de la ville de Nesha. Cette cité n'a
pas été identifiée, mais il se pourrait bien que ce ne
soit jamais qu'un autre nom de Kanesh . Les scribes ont adopté pour écrire
leur langue les cunéiformes mésopotamiens, qui représentent
des syllabes ou des logogrammes. Ce qui rend difficile l'interprétation
de la langue, c'est que nombre de mots hittites sont écrits avec un sumérogramme
qu'on peut traduire du sumérien mais dont on ne sait à quel mot
hittite il correspondait. Ont ainsi été catalogués, en
comptant les numéraux, 324 signes cunéiformes. Comme toutes les
langues indo-européennes, le hittite est une langue à flexion
qui connaît six cas : noms-natif, accusatif, génitif, datif, ablatif
et instrumental, à quoi l'on peut ajouter le vocatif pour les déclinaisons
des noms de personne. En revanche, les genres ne sont pas, comme dans le grec
et le latin, le singulier, le pluriel et le neutre, la différence jouant
sur l'animé et l'inanimé. Les verbes connaissent deux voix l'actif
(qui est transitif ou intransitif) et le médiopassif. L'actif possède
deux voix ou conjugaisons, en -mi et en -hi. Le médiopassif ne possède
qu'une seule conjugaison. Les modes sont au nombre de six: trois personnels
(indicatif, volontatif et impératif) et trois impersonnels (infinitif,
participe et supin). Les archives d'Hattusa nous
ont rendu un certain nombre de textes : traités, lettres, annales, instructions,
lois, rituels, prières, omens, mythes.
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